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Eloge du silence

Le silence est souvent interprété comme une absence de communication.
Incontestablement un état d’incommunicabilité incite au silence, mais toute forme de silence n’est fort heureusement pas le reflet de cette incapacité.

Expressions opposées

Comment être sûr de bien interpréter le silence?
Les époux qui ne se parlent plus, n’ayant plus rien à se dire, ne vivent pas la même qualité de silence que ceux qui n’ont plus besoin de parler pour se comprendre.

Le silence a parfois des expressions totalement opposées.
Quand le silence reflète le désordre mental, la haine, l’horreur, il est tourmenté, hostile, pétrifié.
Quand le silence est le fruit du recueillement, de la sérénité, de la passion, il est alors contemplatif, paisible, inspiré.

Le silence est aussi un spectacle affligeant. Comme celui d’une famille triste et résignée, que tout enfant perçoit comme une réprobation de sa joie de vivre.

Symphonie silencieuse

Dans certains cas le silence est une réaction instinctive et viscérale.
Le mutisme, ce silence provocateur, se manifeste par un déni de la réalité, un refus de parler pour des causes affectives ou mentales. Faute de pouvoir fuir, la personne s’enferme dans un silence opiniâtre. Comme l’inculpé devant ses juges, ce mutisme condamne autant que des aveux.

Cette symphonie silencieuse, parfois tragique, comporte d’autres variations.
Le silence compatissant de la douleur et du deuil.
Le silence qui cherche la vérité par la concentration, l’observation, l’attention, la découverte, la vigilance. La perception de l’invisible.
Le silence de l’acceptation et du pardon, quand cessent les reproches et le ressentiment.

Parole et silence

Placé dans le contexte de la communication verbale, le silence acquiert tout son sens en donnant de l’espace et du relief aux mots. De la même manière que la musique n’existerait pas sans le silence entre les notes.
Mais quand les mots deviennent des banalités et des stéréotypes, ils constituent plus une source de dissonance qu'un sens auquel s'accrocher. Comme il y a une parole muette parce qu’elle ne transmet rien, il y a aussi un silence capable de révéler tout un monde.
Au cœur de l’action, on ne parle pas.
Il est tout aussi possible de construire en se taisant que de démolir en parlant. Comme nous le constatons avec regret, lorsqu’un mot de trop suffit parfois à briser la confiance réciproque.

Le silence crée alors un espace d’écoute, où les gens qui ont l’habitude de parler sans réfléchir, trouvent auprès d’interlocuteurs réceptifs, la motivation nécessaire pour s’interroger sur le sens de leurs propos.

Contrairement aux paroles, le silence ne laisse jamais indifférent. Nous l’interprétons en fonction de l’attitude de celui qui l’exprime. Lorsque nous observons un visage accueillant et souriant, le silence agit alors comme un phare. Il illumine les recoins obscurs de notre conscience et nous encourage à ne plus mentir.

Chaque fois que nous prenons le temps de découvrir les émotions qui se cachent derrière les mots, nous construisons des ponts entre les hommes.

Il existe donc un silence qui parle. Ce silence trouve sa source en nous, il est le reflet de notre paix intérieure.